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Magyd Cherfi/Coin écriture (Page 4)

Coin écriture

Barack, Sadiq, et nous …

Il s'appelle Sadiq, lui il est élu maire, maire de Londres. Maire de la capitale des capitales. Élu presque banalement, j'ai failli dire normalement si ce n'est qu'il est musulman dit-on, fils d'un chauffeur de bus, d'une famille issue de la misère Pakistanaise venue s'échouer dans la banlieue londonienne. Il a été élu sans surprise, même pas outsider mais donné gagnant dans tous les sondages et dans la rue. Il a été élu par...

Gens du seizième II

Je m'incline devant la portion congrue, les riches déburnés, les fautes d'orthographe, les ouvre-boites et les filles qu'on dit en fleurs, je m'incline devant la couverture universelle, les parasols qui font de l'ombre à mon derrière, la craie et son tableau qu'elle ne veut pas quitter, le témoin qu'à jamais croisé Jéhovah, la toux et le barbier qui n'a rien d'Espagnol, Mamie Nova et les demeurés du bocal, le mois de Mai qui n'a...

Religions

Oh mon église Saint-Sernin, brassée d'anticyclones moins lointains que ceux des Açores. C'est dimanche et soufflent autour de la bâtisse des vents salutaires et chauds, des courants d'airs à vous brunir la peau. À l'intérieur, c'est le blizzard de la mort, le ton est grave. À l'extérieur, des cris stridents vous brisent le tympan. Ma Babel se colore d'un d’un arc-en-ciel de langues anciennement soumises aux républiques à étages. À l'intérieur, une langue morte...

Gens du seizième

Je m'incline devant tous les lampadaires, la tulipe et sa queue, le b.a.-ba qui fait un jour les premiers pas, la lune vue d'en bas, l'oiseau de Saint Denis, l'instituteur d'après, le voleur et le poil, la feuille et son angoisse d'être immaculée.Je m'incline devant l'escargot pas penaud, la plèbe et la gratin dauphinois, je m'incline devant l'auxiliaire avoir, Souchon même Voulzy, le cuir et le barbelé. Je m'incline bien sûr devant le boxeur, Mitosyl...

C’est dur d’être haï par des cons

Abdeslam, Arrêté, qu'en ais-je éprouvé ? Qu'en déduire ? En vrai de la colère, au bas mot une amertume car j'aurais voulu que tous ces imbéciles se targuent d'un discours, d'une démonstration taillée dans une langue solide. J'aurais toléré une argumentation même saugrenue pour justifier leurs inqualifiables actes. Oui, j'aurais aimé une thèse même obscure, une rhétorique révolutionnaire, un laïus Palestinien ? ...

Le foot à droite (ou Les lauriers d’Aurier)

extrait de Livret de famille paru chez Actes Sud) Le football est-il de droite ? ou plutôt, existe-t-il un footballeur de gauche ? Franchement, je me pose la question. Est-ce qu’il arrive à un footballeur de ne pas aller au plus offrant ? Est-ce qu’il peut émettre une priorité autre que celle du fric ? J’sais pas moi… se contenter d’être multimillionnaire plutôt qu’archimillionnaire. Sans chercher un pote à Besancenot, est-ce qu’un bout de conscience de classe...

À cent jours de l’euro …

J'étais môme ma mère me disait : « Il n'y a rien de plus stupide que de courir derrière une balle qu'il faut domestiquer avec ses pieds, c'est avec sa tête qu'on devient un homme, on la remplit d'abord et c'est après qu'on s'amuse. Mon fils, c'est pas bien de se servir de ses pieds, les pieds c'est pour les animaux. » Résultat je suis minable balle au pied. Pourtant je n'ai aimé que le foot. Je m'en suis même...

Mille et un merci !

Mille et un merci ! Voilà nous y sommes ! Je me retrouve sans mots, moi qui ne vit que par eux. Méchant paradoxe qui débouche pourtant dans une joie immense, une émotion à vous scotcher les paupières. Vous avez été des centaines. C'est pas donné à tout le monde de compter des centaines de gens prêts à vous porter pour une idée du monde, un texte, une émotion. Ces trois mots sont beaucoup et peu...

Le livre

Décidément on ne lit pas le même livre. À les écouter, ils sont eux les élus et nous les dégénérés. Ils ont du bol de s'être ainsi arrogés la bonne place, de s'être assis du bon côté de l'éternité. Moi je ne me paie pas ce luxe. Je ne suis pas sûr d'être au bon plaisir de dieu, je me dis qu'il doit pas aimer que je m'interroge sur le sens de la vie....

Mes excuses à la France

Reprise du texte paru initialement dans le Liberation du 25 janvier 2016. Madame, on vous promet de plus vous embêter. Pardon de vous exaspérer, de vivre qu’entre nous, de brouiller votre identité, oh pardon de pas être chrétien. On sera français pour de vrai, promis on mourra pour la patrie. Madame, restez vous-même, éternelle ! Pardon de désosser votre socle millénaire, pardon pour l’Empire qu’on a déboîté, pardon pour le désordre à chaque coin de...

La déchéance II

Après tous les hommages et nos corps en suspens, qu'avons-nous solutionné ? Je doute, sauf de mon âme endolorie. Qu'avons-nous retenu de choses à retenir ? Rien de fondamental à mes yeux. Rien qui ait pris le risque d'une république cosmopolite, qui n'aurait été (au fond) qu'un axe vers la modernité car ce mélange dont on vous rebat les oreilles n'est pas qu'une posture d'idéalistes repus, il est simplement l'armature du monde de demain. Mais...

La déchéance

Après Charlie, après les carnages et les fous qui n'ont pas assassiné que leurs victimes, après la sidération, l'émotion, on est restés chancelants. Chancelants mais pas définitivement éteints. On se contemple vivants et l'on se dit : « qu'avons nous faits de nous mêmes ? » De nos proches, de nos voisins de nos concitoyens. Pourquoi le gouffre ? Ce précipice béant. Aujourd'hui on mesure l'étendue du malentendu. Le prix de l'indifférence, la distance en année lumière qui...

Nadine chez les blancs

Nadine c'est quoi la blancheur de la peau ? C'est quoi être blanc ? Et ça sous-entend quoi ? Quand tu t'enorgueillis d'être blanche c'est dans quelle intention ? Qu'est-ce que tu présupposes ? J'ai des réponses et pas de vérités. Moi qui suis fils d'immigrés algériens et qui dans leur exil ai perdu ma langue, suis devenu au fil de la francité, l'étranger de ma mère. Oui, très vite je n'ai plus parlé kabyle...

J’ai peur

Ça y est ! Ils sont là, si près qu'ils sont presque nous. Comme des ombres qu'on espère ne pas être les nôtres. On peut toujours croire qu'on en est pas ...

130 Hommages

Je préfère perdre et me perdre dans des crises qu'on dit d'identité. Perdre haleine, fuir et même déserter. Perdre un doigt, mon honneur s'il le faut. Perdre le goût, le goût tout court, le goût des autres, l'odorat et le reste, la mémoire et mes meilleurs amis. Oh Préférer perdre le sens de l'humour, le nord et les points cardinaux. Perdre du terrain sur l'agenda du monde qui va comme il le peut. Perdre une fonction...

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